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L'après, l'ici et maintenant
6 mars 2013

Georges Moustaki

 

Georges Moustaki 

 

 


 "Vivre ce qui peut encore se présenter"

 

 

 

  

Ne plus jamais chanter. Georges Moustaki a dû s'y résoudre, vaincu par l'emphysème qui détruit ses poumons. La maladie est incurable, mais il se bat. Après une lourde opération et un été de rééducation à la Maison du Mineur (Vence), l'artiste est en convalescence sur les hauteurs de Nice, assujetti à la machine qui le maintient en vie.

 

Sous oxygénation artificielle, cette interview est, pour lui, un effort inouï. Mais la tentation était forte de passer en revue son Petit abécédaire amoureux de la chanson, aux éditions de l'Archipel, où il évoque toutes celles et ceux dont il a été l'amant, ou l'ami.

 

 

Pourquoi cette vie à Nice?

J'ai trouvé ici des points d'accueil, des thérapeutes et un environnement qui me conviennent. Je suis insuffisant respiratoire. Je dois éviter le froid de Paris. Et la pollution. La Méditerranée me va très bien. J'ai cette superbe terrasse qui reçoit le soleil et remplace avantageusement mon logement de l'Île Saint-Louis.

 

 

Où en êtes-vous de votre combat contre la maladie?

Je continue. Ce n'est jamais gagné. Depuis dix ans, je trouve que je suis beaucoup trop âgé! Je pensais que soixante-dix ans de vie, c'était suffisant. Si on me donne plus, je prends. Mais je voudrais le faire dans de bonnes conditions. Alors je me bats.

 

 

Ne plus chanter, c'est une souffrance supplémentaire?

Je regrette de ne pas chanter dans ma salle de bains. Chanter en public, non. J'ai fait le tour. Le tour du monde et le tour des salles, petites ou grandes. J'ai vécu des choses magiques. J'ai appris que ce qu'on croit avoir acquis n'est qu'une partie infime de ce qu'il reste à découvrir. Je pensais m'arrêter tranquillement. Non pas par lassitude, mais parce que tout cela perdait un peu de sa fraîcheur. Et puis, je n'avais pas envie d'un recommencement éternel comme Barbara en 1969…

 

 

En 2013, les enfants apprennent vos chansons. Cela vous touche?

C'est flatteur, certainement. Mais au-delà, il y a la récompense d'avoir servi un art et une langue que je vénère. J'aurais pu atteindre le succès et la notoriété avec des chansons de moindre qualité. Le goût que j'ai eu de les soigner me donne pour récompense qu'elles sont transmises aux jeunes générations.

 

 

Cette pérennité est une satisfaction?

Ce n'est pas l'essentiel. Dans la création, ce qui compte, c'est de créer! Le reste est secondaire. J'ai reçu au-delà de ce que j'espérais, mais je n'étais pas en attente.

 

 

Écrivez-vous encore des chansons?

Je note quelques idées. Sans hâte.

 

 

Milord, pour Édith Piaf, c'est vous. Une fierté?

Le mot n'est pas adapté. J'ai été comblé d'avoir une extraordinaire interprète pour une œuvre que j'apprécie parmi celles que j'ai faites. La carrière de cette chanson, c'est très valorisant.

 

 

Quelle place occupe Piaf dans votre vie?

Une place primordiale. Elle a ouvert une porte. Je ne savais pas ce qu'il y avait derrière, j'y ai trouvé tellement de choses… J'ai partagé avec Édith une histoire d'amour et une passion musicale. Ce qui fait de cette rencontre un événement majeur dans ma vie.

 

 

Tout cela vous paraît loin?

C'est très présent! Quand j'entends Piaf et celles qui s'en inspirent, je réalise à quel point elle était en avance. Elle reste la plus moderne. La plus étoffée.

 

 

Que pensez-vous de Patricia Kaas reprenant Piaf?

Joker!

 

 

Vous souvenez-vous de la montre que Piaf vous a offerte?

Un jour, j'étais dans mon bain quand un employé de la maison Boucheron, qu'elle m'avait envoyé, est arrivé en livrée avec tout un plateau de montres. J'ai cherché du regard celle qui me paraissait la plus simple, j'en ai choisi une en métal blanc. Quelques mois plus tard, j'ai eu un accident de voiture et cette montre, que j'avais posée sur le tableau de bord, a disparu. J'ai appris à cette occasion qu'elle était… en platine !

 

 

Vous décrivez dans votre livre bien d'autres rencontres. Dont Carla Bruni et Lara Fabian…

Ce sont de jolies femmes qui chantent bien, chacune dans son registre. Lara Fabian peut être indigente dans ses paroles, et elle n'utilise pas toujours au mieux sa voix. Mais cette voix a une qualité intrinsèque irréprochable.

Avec Carla Bruni, c'est l'inverse?

Exactement! Mais ça revient au même. Elle n'a presque rien et elle en fait un bijou. Comme Françoise Hardy, qui a survolé les époques avec un filet de voix. Un filet de voix si joliment exprimé que ça tient le coup.

 

 

Avec Coluche, c'est la moto qui vous a rapprochés?

Oui, c'est une passion. J'ai eu huit motos en soixante ans. Dont une BMW que Coluche, alors plongeur dans une boîte où je chantais, entretenait avec des pièces qu'il fauchait. Des feux de position, des écrous pour la selle: de tout petits larcins. Lui aussi était fou de motos. Mais il aimait la performance alors que ce qui m'attirait, c'était la liberté.

 

 

Aviez-vous décelé son talent?

Pas du tout. Dans la vie, il était drôle à chaque seconde. Mais sur scène, c'était fade pour mon goût. On le voyait venir. Nous avons été très intimes avec Coluche. La guitare que vous voyez ici, c'est lui qui me l'a offerte. Une Ramirez. Ça ne s'oublie pas!

 

 

Vous avez eu du joli monde sur votre selle: Hardy, Deneuve, Barbara, Brigitte Fontaine…

Pour ne parler que des connues… On n'avait peur de rien. J'ai proposé à Deneuve de la raccompagner après un tournage, elle ne s'est pas dégonflée. Quant à Barbara, elle adorait. Pour un peu, j'aurais fait une tournée à moto avec elle.

 

 

Barbara aimait la vie?

Elle aimait rire, elle aimait manger, elle aimait les hommes. Elle aimait vivre. Barbara mettait un voile austère pour éloigner les fâcheux, mais sinon, elle était prête pour la gaudriole !

 

 

Et Brigitte Bardot?

Bardot avait plein de défauts mais elle était irrésistible. Je l'ai frôlée… Ce qu'elle est devenue? On n'a pas envie de renier ce qu'on a aimé.

 

 

Avez-vous des désirs inassouvis?

Je veux écrire et peindre. Consacrer mon temps à ce qui me fait plaisir, comme je l'ai toujours fait. J'ai envie de vivre ce qui peut encore se présenter.

 

 


 

 

Repères

1934: Le 3 mai, naissance à Alexandrie de parents grecs.

1958: A Paris depuis 1951, vit une passion avec Édith Piaf, de 19 ans son aînée. Il lui écrit Milord.

1968: Le Métèque, l'un de ses plus grands succès avec SarahMa Solitude ou Ma Liberté.

1970: Premier grand concert à Bobino.

2008: Sortie de Solitaire, le dernier d'une vingtaine d'albums.

2009: Sa maladie respiratoire le contraint à annuler un concert à Barcelone. En 2011, il se retire.

 

 

Publié le dimanche 17 février 2013 à 07h02 par nicematin.com

 

 

 

 

 

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  • Ce blog s'adresse à ceux qui s'interrogent sur l'après, la mort, le grand départ. Je fais partie de ceux qui sont morts et sont revenus. Depuis cette expérience, mon appréhension du monde, de l'univers de la réalité est bouleversé.
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