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L'après, l'ici et maintenant
13 janvier 2013

La danse et le sacré avec Béjart

       Maurice Béjart s'est éteint le 22 novembre 2007

                                              Maurice Béjart

 

                                                       Maurice Béjart

                  Maurice Béjart, danseur, chorégraphe, écrivain et réalisateur © Colette Masson / Roger Viollet

 

 

 

Maurice Béjart avait une manière originale de définir son art :

"La danse n'a rien à raconter, elle a beaucoup à dire".

Il s'est éteint le 22 novembre à 80 ans.

 

 


De danseur à chorégraphe 


Né le 1er janvier 1927 à Marseille, Maurice Béjart commence à danser dès l'âge de 14 ans mais débute véritablement sa carrière en 1946 à Vichy. De son vrai nom Maurice Berger, il émigre rapidement vers l'opéra de Londres. C'est en 1955, à 28 ans, qu'il se tourne vers la chorégraphie en montant son premier ballet, Symphonie pour un homme seul. Véritable succès, cette oeuvre lui permet d'asseoir sa réputation et d'imposer un style qui puise aussi bien dans les répertoires classiques (Prométhée) que contemporains (Huis clos).

 

Artiste touche-à-tout 


En 1960, profitant du triomphe du Sacre du Printemps, Maurice Béjart  fonde la compagnie du Ballet du XXe siècle qui deviendra en 1987 le Béjart Ballet Lausanne. Il créé aussi des écoles de danses : les Mudra de Bruxelles et de Dakar. Son ouverture vers le théâtre, l'opéra, ou le cinéma lui donnent un statut d'artiste caméléon et lui vaut d'être élu à l'Académie des Beaux-Arts en 1994. Maurice Béjart ne tourne pas pour autant le dos à sa passion. La création de nouveaux ballets autour de thèmes éclectiques et surprenants (Mère Térésa et les enfants du monde) illustrent son ambition de faire sortir la danse des canons classiques. Et, peut-être, de lui faire "dire" d'autres choses.

Source : Linternaute

 

 

                                  La Danse et le Sacré

  

 

Suite à la disparition de Maurice Béjart le 22 novembre 2007, Nouvelles Clés, dont il était ami et fervent lecteur, lui rend hommage en vous présentant cet entretien réalisé il y a quelques années par Gilles Farcet.

Il faut avoir vu évoluer sur une scène la troupe de danseurs dirigés par Maurice Béjart pour comprendre la force de l'évènement ainsi créé et les répercussions profondes qu'il peut avoir sur chacun des spectateurs. Le chorégraphe sait mener les consciences vers la métamorphose, vers la mue de l'égrégore formée par le public et chaque ballet qu'il règle est une révélation.

Entrée des artistes du Palais des Congrès où des danseurs nippons, dirigés par Béjart, vont donner ce soir le ballet japonais. Le maître arrive, d'un pas rapide. Me voici donc face à ce singulier regard, mille fois capté par les photographes. De toute évidence, Béjart est encore plus intimidé que moi. Je ressens tout de suite son authenticité, sa totale absence d'affectation. On lui a fait part de mon projet d'entretien centré sur son itinéraire intérieur.

Mon interlocuteur se défie des interviews à prétention métaphysique. J'ai affaire à un homme fort pudique, peu soucieux de trop parler de ce qu'il importe avant tout de vivre. Nous échangeons quelques mots, nous nous regardons. Je cherche à l'assurer que je ne le "trahirai" pas, ce à quoi il réplique que je ne saurais faire autrement que le "trahir" : je verrai "mon" Béjart, coucherai sur le papier ma perception de notre entrevue. Je dois convenir qu'il a raison. Un ou deux mots encore, de nouveau nos yeux se croisent.

C'est oui. Rendez-vous est pris chez lui, en Suisse.

 

 

Un matin à Lausanne 


La place Ripone est presque déserte ce matin, tandis que je pénètre dans un immeuble cossu. Coup de sonnette, la porte s'ouvre, je retrouve le regard vert. Le seuil à peine franchi, me voici non plus en Suisse, mais au Japon. Une bonne odeur d'encens imprègne ce grand appartement dépouillé qui pourrait être celui d'un lettré de Tokyo. Les lieux sont imprégnés d'une atmosphère méditative. Mon hôte me confiera plus tard qu'il n'aime guère parler de si bonne heure. L'après-midi le verra assis devant l'immense miroir où se reflète la troupe qui répète, et il a coutume de consacrer la matinée au silence. Je ne lui en serai que plus reconnaissant du temps et de l'énergie qu'il voudra bien m'accorder.

Nous empruntons un escalier pour gagner sa chambre où nous deviserons assis par terre sur des coussins. D'un bout à l'autre de l'entretien, Béjart gardera près de lui le Traité de l'amour de Ibn' Arabi, publiée en poche par la collection "Spiritualités Vivantes".

Commençant la conversation, je sens qu'il me faut m'arracher aux questions préparées pour être tout à l'écoute.

 

Nouvelles ClésJ'ai noté ce passage de votre livre ( Un instant dans la vie d'autrui , éd. Flammarion) où vous dites que "la publication des Correspondances complètes sera un jour remplacée par celle des interviews ".

Maurice BéjartMon goût des interviews vient de ce que j'aime découvrir des êtres. Lors d'une entrevue, je découvre celui qui me questionne. C'est l'interviewé qui, finalement, interroge l'interviewer. J'y trouve donc un intérêt du point de vue des rapports humains.

 

N. C.D'autre part un interviewer posant des questions profondes vous donne peut-être l'occasion de préciser certaines choses, de faire jaillir des intuitions donnantes au fond de vous-méme ?

M. B.Vous savez... Je me découvre dans mon travail. Cela me suffit.

 

N. C.Vous avez eu une vie pleine, riche, ce qu 'on appelle un destin. Or, j'ai été frappé par la récurrence dans votre livre de phrases telles que : "quand les choses doivent se faire, elles se font" ; "les rencontres viennent toujours à point nommées"... Vous croyez à une forme de prédestination ?

M. B.Oui, assurément. Bien entendu, je crois en la volonté en l'existence du libre arbitre. Mais je vois à l'oeuvre une certaine prédestination. C'est dans les petites choses qu'il nous faut intervenir ; quant aux grandes, le destin s'en charge. Chaque matin, je décide d'accomplir un nombre donné de tâches. Mais s'il s'agit de se demander s'il me faut quitter Bruxelles pour Lausanne, ou plutôt revenir à Paris... Les décisions de cette importance se sont toujours prises en dehors de moi, par la force d'un destin qui me conduit, sans qu'il me faille m'en mêler. Pour les détails, je suis très organisé, méthodique. Par contre, les grands choix de mon existence, je les ai joués à pile ou face.

 

N. C. : Vous utilisez parfois le Yi-Ching ?

M. B.Oui, mais ce n'est pas tout à fait pareil. Le Yi-Ching ne vous dit pas vraiment ce qu'il faut faire. Il vous motive, vous pose des problèmes, vous fait voir une certaine réalité. Par contre, il ne serait pas bon de le prendre pour un oracle, de s'en servir comme d'une voyante.

 

N. C. : Le libre arbitre joue sans doute un grand rôle dans la vie d'un artiste sous la forme de l'acharnement, de la volonté de perfection...

M. B.Vous savez, notre époque a beaucoup abusé du mot "artiste". En vérité, les plus grands artistes furent des artisans. Les sculpteurs égyptiens ou les bâtisseurs de cathédrales étaient des hommes qui possédaient en profondeur un métier et n'éprouvaient pas le besoin d'apposer leur signature sur une oeuvre réalisée selon des canons traditionnels. Par la suite, au métier est venue s'ajouter la personnalité. L'on trouvait à la Renaissance des personnalités telles Léonard ou Michel-Ange, soutenues par un métier sublime. Puis, petit à petit, la personnalité en est venue à détruire le métier. Et nous voici à notre époque où l'oeuvre d'art n'est plus rien qu'une signature. Je ne sais s'il reste aujourd'hui des artistes ; je suis par contre persuadé qu'il n'y a presque plus d'artisans. Cela dit, et pour en revenir à cette question de la détermination chez un créateur, je vois là encore un double mouvement. D'un côté, nul ne peut nier l'importance de l'acharnement, que l'on retrouve chez les mystiques comme chez les conquérants. Mais en même temps, il convient de se laisser porter par le destin. Pour ma part, j'établirais une distinction entre vouloir et décider. Il est capital de vouloir sous peine d'être un faible et un lâche. Mais à quoi bon prétendre décider ?

Le jour où l'on se met en tête de "décider" on va contre la volonté divine on s'oppose au mouvement des choses. Ne croyez-vous pas que les grands conquérants ont amorcé leur chute du jour où ils se sont crus libres de décider ?

 

N. C. : Croyez-vous que le réel nous fasse des signes, nous lance sans cesse des indications ?

M. B.Le réel fait partie de nous. Lors de ces grands moments que certains nomment des "extases" - mais les mots, à ce stade ne veulent plus rien dire - la notion de "moi" devient floue : où est-ce que je commence, où est-ce que je finis, où se termine la source, où s'ouvre la prairie ? Lorsque nous nous sommes rencontrés, l'autre jour à Paris, vous m'avez demandé de vous parler de moi.
Or, qu'est-ce que le moi ? Je n'en sais trop rien. Il m'arrive, comme tout le monde, de m'identifier à tel ou tel aspect... au corps, par exemple. Mais suis-je vraiment ce corps ? A mon avis, le fait que je puisse dire "ma main" montre que non. Je dis "ma main" comme je dirais "mon pantalon". Et si l'on me coupait la main je resterais moi-même... Alors encore une fois, ce "moi-même", où commence-t-il où finit-il ? C'est d'ailleurs l'un des problèmes que me pose l'idée de la réincarnation. J'y crois tout en me disant que nous nous en faisons une idée trop grossière. Qu'est-ce qui se réincarne ? Qui ?
Voilà un point subtil. Croire à la réincarnation telle quelle équivaut à croire au moi. Et, en ce qui me concerne, je n'y arrive pas. Selon les lois de la physique, rien ne se crée, rien ne se perd. Mon corps organique va mourir. Il deviendra terre, laquelle terre sera récupérée par des plantes qui y mettront leurs racines... Une très faible partie de ce corps vivra donc dans mettons, une fraise. Il en va de même, me semble-t-il, pour l'esprit. Wagner est mort, son esprit s'est dissous. Il serait absurde de prétendre avoir été Wagner dans une "vie antérieure" ; par contre, il se peut qu'une infime partie de ce qui le composait vive aujourd'hui en moi. Cela dit, il est possible que des êtres ayant atteint un très haut degré de développement spirituel puissent, afin de poursuivre un travail donné, éviter cette dissolution naturelle.

 

N. C. : Vous êtes entrain de me parler des boddhisatvas...

M. B.Exactement. De même, on observe que les dépouilles de certains saints ne se décomposent pas, comme si des vibrations gardaient tout cela entier. Je crois que l'esprit des êtres parvenus à l'illumination ne se désagrège pas et peut, tel quel, transmigrer dans un autre corps. Mais cela n'est possible que pour de très rares personnes et dans un but bien précis. Nous sommes loin du cas de la concierge persuadée d'avoir été Madame de Maintenon (rires).

 

N. C. : De plus, je ne vois pas comment des êtres désagrégés et dispersés de leur vivant pourraient rester intacts à la mort du corps...

M. B. : Eh oui...

 

N. C. : Avant la passion de la danse, vous avez eu celle du théâtre qui, dites-vous dans vos mémoires, était "la vraie vie". Pourquoi la vraie vie ? L'autre était une illusion ?

M. B. : C'est une affaire de point de vue. La réalité est mouvante. Les choses sont réelles tant que nous désirons les voir ainsi. Je me suis très tôt reconnu dans le théâtre, dans cet artisanat qui m'a permis d'approcher la profondeur et est devenu pour mol une voie de connaissance. Prenez Baudelaire, par exemple : je peux le lire pendant dix ans sans être sûr de le connaître. Mais si je le mets en scène - j'ai fait un ballet sur l'auteur des Fleurs du mal - il me semble avoir eu de lui une connaissance particulièrement profonde, à la fois métaphysique et sexuelle. Presque comme si je l'avais "connu" au sens biblique du terme. Je l'ai fait bouger, parler, danser... Jamais la seule lecture ne m'aurait permis une telle intimité avec le poète.

 

N. C. : A propos de Baudelaire et de la Bible, vous dites avoir reçu dans votre éducation "une double dose de catholicisme et de Baudelaire"...

M. B.Le catholicisme a été pour moi un élément très formateur. J'ai été élevé à Marseille dans une école religieuse, le Sacré-Coeur, où j'ai passé douze ans de ma vie à aller à la messe tous les matins, sans moindrement me révolter. En même temps, mon père, le philosophe Gaston Berger, me disait : "Toutes les religions se valent. Il convient d'en choisir une et de s'y tenir. Il importe surtout d'en adopter une très jeune, quitte à lui en préférer une autre plus tard. Libre à celui qui a grandi dans une foi d'en changer à l'âge de la maturité ; mais qui n'a pas eu de religion au départ risque de ne jamais découvrir cette dimension essentielle de l'existence." Il avait raison. C'est un peu, voyez-vous, comme le fait de savoir nager. Si l'on met très vite les bébés dans l'eau, ils nagent. Ils auront plus tard tout loisir de voir s'ils préfèrent pratiquer le crawl ou la brasse papillon. Mais un adolescent qui, à quinze ans, a peur de l'eau ne nagera jamais très bien. Il faut se jeter dans la religion, car elle est l'une des valeurs fondamentales ode de l'être humain, de même qu'il est bon d'apprendre très jeune à lire.

On verra ensuite si l'on dévore le journal du soir ou les oeuvres complètes de Kant ! J'ai donc reçu une éducation religieuse, mais sur un fond de grande liberté. Mon père accueillait toutes sortes de gens à la maison, des Hindous, des Chinois... Pour moi, l'ouverture allait donc de pair avec une formation catholique très stricte et dont je ne me plains pas.

 

N. C. : Vous adorez Baudelaire, chez lequel on trouve à la fois une élévation spirituelle et une insistance sur le corps, les sens...

M. B.Il y a chez Baudelaire, un côté très religieux, voire mystique, et également une dimension prophétique. Certains de ses textes paraissent si contemporains que l'on a peine à croire qu'ils ont été écrits au XIXe siècle. Dans le spectacle que je lui ai consacré, on lisait sur scène des passages tels que celui-ci : "La mécanique nous aura tellement américanisés, le progrès aura si bien atrophié en nous la partie spirituelle, que rien parmi les rêveries sanguinaires, sacrilèges ou antinaturelles des utopistes ne pourra être comparé à ses résultats positifs. Je demande à tout homme qui pense de me montrer ce qui subsiste de la vie. Un spectateur sur deux venait ensuite me voir et me disait : "Vous avez modifié les textes, ce n'est pas de lui..." ou "il n'a pu écrire cela au siècle dernier"...

Connaissez-vous cette autre phrase de Baudelaire: "Avis aux communistes : tout est commun, même Dieu." Surprenant, non ? Et j'en découvre encore tous les jours, bien que l'oeuvre ne soit quantitativement pas très importante.
Mais quant à sa qualité... Elle aborde les questions esthétiques comme les problèmes religieux, est à la fois profonde et frivole, très touchante et secrète.

 

N. C. : Vous avez, dans votre livre, des mots assez durs sur le mépris du corps dans la religion chrétienne...

M. B.Pas uniquement chrétienne, attention ! C'est un fond judéo-chrétien que l'on retrouve chez les Arabes, chez tous tes "gens du Livre". A l'égard du corps, deux attitudes sont possibles : soit on le brime sous prétexte qu'il est inférieur à l'esprit, soit on en use comme d'un cheval, pour aller plus loin. Lorsque l'on possède un cheval, on l'aime, on en prend soin, sans pour autant le laisser cavaler à droite et à gauche. On le guide. C'est la voie du yoga dans laquelle on se sert du corps pour croître en spiritualité. Je ne nie pas la sainteté de certains mystiques chrétiens qui martyrisèrent leur corps. Sans doute la négation du corps peut-elle parfois déboucher sur une mystique... Mais le plus souvent, elle ne provoquera que d'importants traumatismes.

 

N. C. : Ce corps, votre corps, vous l'avez durement traité dans votre jeunesse, pour devenir un danseur...

M. B. Durement, oui, mais comme l'on élève un cheval de course. Dans leur rapport au corps, les ascètes chrétiens me font penser à un paysan qui aurait une haridelle à laquelle il ne donnerait rien à manger tout en lui tapant dessus. Dans le cas d'un danseur, l'entraînement, s'il est très dur, est tout de même rationnel et vise à un résultat qui, je crois, s'avère assez beau.

 

N. C. : Vous aimez la poésie, mais les corps vous manquaient lorsqu'au lycée vous lisiez des poèmes. Le corps a donc dès le départ été important pour vous ?

M. B.J'ai une lointaine ascendance africaine ; peut-être retrouvais-je instinctivement ces racines... Le président Senghor me disait un jour que pour un Africain, le poète authentique devait être capable de chanter et de danser ses poèmes. L'on retrouve là Nietzsche et Zarathoustra et ce que je sentais moi-même de façon diffuse : la vision d'un théâtre intégral.

La tragédie grecque n'était-elle pas à la fois chantée, dansée et récitée ? Dans le théâtre Nô japonais, l'acteur est un danseur et le point culminant de la pièce est toujours la danse.

Or, dans notre civilisation occidentale, nous avons atteint une technicité très grande en divisant tout. Dans chaque domaine, nous allons loin, plus loin sans doute que beaucoup d'autres cultures, mais nous ne savons ensuite comment réunir ces différents secteurs. Si l'Occident a fait un prodigieux bond technologique, il a du même coup perdu certaines bases traditionnelles qui sont pourtant essentielles. De là provient le malaise que nous connaissons actuellement. Cela dit, soyons prudent lorsque nous parlons de l'Orient. Qu'est-ce donc que "l'Orient" aujourd'hui ? Nous ne savons plus très bien où il est, s'il existe. Disons simplement qu'il y eut une époque Où des pays avaient su conserver le sens de la tradition sans connaître d'avancée technologique, tandis que d'autres passaient par la situation inverse. Finalement, l'idéal ne serait-il pas l'assemblage des deux, technologie et tradition ?

 

N. C. : La danse a-t-elle dès le début constitué pour vous une forme de dépassement, de recherche spirituelle consciente ?

M. B. : Non, je n'ai que très tardivement pris conscience de cette dimension. Ma première volonté était de faire du théâtre. J'adorais toutes les formes de spectacle, l'opéra entre autres. Je suis venu à la danse un peu par hasard et me suis passionné pour elle. On m'a dit au départ, sans doute avec raison, que je n'étais pas très doué. C'est pourquoi je me suis acharné afin de prouver aux autres et à moi-même que je réussirais. Animé par cette idée fixe, je n'ai guère eu le temps de m'interroger par ailleurs.

 

N. C. : C'est tout de même à travers la danse que vous vous êtes graduellement ouvert à la dimension spirituelle ?

M. B. : Je ne sais pas... Enfant, j'étais déjà très ouvert à cette dimension. Puis je l'ai, non pas perdue, mais occultée lors de mes premières années de danse, car je me préoccupais seulement de vaincre mes difficultés. Pendant dix ans, je me suis donc consacré à la conquête d'un corps rêvé, perdu et retrouvé. Mais si la spiritualité n'avait pas été présente au départ, elle ne serait pas venue ensuite.

 

N. C. : Vous dites que la danse est un phénomène d'origine religieuse. Cela n'est-il pas vrai de tous les autres arts ?

M. B. : Si, bien sûr !

 

N. C. : Pourquoi la danse devrait-elle plus particulièrement retrouver ses origines rituelles et sacrées ?

M. B.Davantage que les autres arts, la danse réunit des composantes diverses : le temps et l'espace, par exemple, alors que la musique est uniquement dans le temps. L'architecture ou la sculpture sont uniquement dans l'espace. De plus, la danse nous permet de relier des activités qui sont ordinairement séparées. Prenons l'activité physique : beaucoup de gens aujourd'hui "font du sport" point final. Dans un autre compartiment, on passe à l'activité émotive, qui peut être religieuse, amoureuse, sentimentale. Puis il y a l'activité intellectuelle. Donc, l'homme moderne voit sa vie divisée : il va au bureau, lieu de la vie intellectuelle.

A la maison, où l'émotion est privilégiée ; puis sur le terrain de sport où il s'adonne à une activité physique. Or, la danse exige que l'on fonctionne sur les trois plans en même temps : physique, intellectuel et émotif. Les danses traditionnelles, dont on a l'impression qu'elles sont improvisées, se révèlent en fait extrêmement élaborées, très compliquées. Les rythmes bindous, par exemple, relèvent des mathématiques supérieures. J'ai moi-même bien du mal à les dominer, après des années d'étude. Quant aux rythmes africains, ils sont également fort subtils. Tous ces rythmes sont des combinaisons mathématiques. Le rythme hindou c'est :
1 2, 1234, 1 2 1, 1, 1 2 3... Vous voyez ? Cela nécessite donc un travail intellectuel quasi scientifique. L'émotion participe, elle aussi, car la danse procède de l'émotivité. Quant au travail physique, il est évident. On utilise ses muscles, on transpire, comme un coureur à pied. La danse est donc l'une des rares activités dans laquelle l'être humain, tout à coup, se retrouve complet. Voilà qui me paraît très important.

 

N. C. : Cela me fait penser à Gurdjieff et à ses danses sacrées qui impliquaient aussi bien la tête que le corps. Pour vous, le renouveau de la danse va bien au-delà d'un problème esthétique : il s'agit d'un enjeu spirituel. Vous considéres donc avoir fait oeuvre spirituelle en renouvelant le ballet au XXe siècle ?

M. B. : Oh, mais je n'ai rien fait ! Tout au plus ai-je donné le coup d'envoi. C'est aux autres de le faire, maintenant.

 

N. C. : Vous avez appelé votre école de danse Mudra. Ce mot, dans le bouddhisme, désigne le geste sacré...

M. B. : Dans le geste bien fait, on retrouve l'artisanat. Voir travailler de vrais artisans me fascine : je trouve une telle beauté dans la précision de leurs gestes... Je pourrais passer des heures à regarder un potier. Avez-vous vu des cuisiniers japonais couper des morceaux de viande à une vitesse folle, dans des structures géométriques d'une perfection totale ? C'est hallucinant. On retrouve cette beauté dans tous les métiers techniques exigeant des gestes précis, efficaces, et toujours variés. La religion s'est elle aussi attachée à retrouver les gestes justes à travers les différents rituels.

 

N. C. : Par la danse, vous tendes à cette perfection du geste ? Vous approches-vous de la spontanéité du calligraphe japonais qui demeure longtemps en méditation avant de dessiner d'un trait ?

M. B.Dans une certaine mesure, oui. Les ballets que j'estime réussis ont été médités très longtemps puis exécutés avec une rapidité folle. Certains chorégraphes me disent qu'ailleurs il faut trois mois pour faire un ballet. Or, il m'est arrivé d'en régler un en trois semaines ! Cela provenait d'une lente et profonde préparation.

 

N. C. : Tout artiste ne se pose-t-il pas, un jour où l'autre, ce que Dostoïevski nommait les "questions éternelles" ?

M. B. : Je ne crois pas qu'on se les pose à un moment précis. Elles sont là dès le départ, et l'on s'interroge régulièrement, tous les huit jours ou tous les huit ans. Je ne discerne pas, dans ma vie, un moment où je dirais : "Il est temps de faire le point". Ce point, je le fais tous les matins. Il n'est pas une oeuvre au milieu de laquelle je ne me sois arrêté en me demandant : "Que suis-je en train de faire, et pourquoi ? Dois-je continuer ?" Il ne s'agit pas d'une tempète survenant une fois dans la vie. C'est une crise permanente, avec des hauts et des bas.

 

N. C. : Les voyages, parfois, font office de catalyseur. Votre premier séjour en Inde a, je crois, été un choc...

M. B.Oui, Calcutta m'a paru insupportable. Cette ville constitue cependant un cas particulier et n'est aucunement représentative de l'Inde. Cette cité hideuse a êté bâtie par les anglais, et la bouleversante misère qui y règne est aussi, en grande partie, une retombée de la politique oocidentale. Il s'agit donc d'un phénomène isolé. Ce choc-là surmonté, l'Inde m'a nourri, changé, mais en quoi, je ne saurais aujourd'hui le dire, car ces influences ont été digérées, elles font maintenant partie de moi. La photo de Ramana Maharsbi, par exemple, est restée pendant dix ans sur mon bureau. Il y a des regards qui... mais cela, vous le savez, inutile d'en parler.

 

N. C. : Un maître hindou vous a conseillé de faire de la danse un yoga...

M. B. : Le yoga consiste à se servir de certains mouvements physiques pour dominer, et épanouir le corps mais surtout le transformer et en faire un allié de l'esprit. Bien conçue la danse n'est rien d'autre. Lorsque ce maître m'a vu travailler, il m'a dit: "Pourquoi chercher une autre méthode ? Vous en avez déjà une, transfigurez-la par la spiritualité." Le mouvement en lui-même n'est pas si important, l'attitude intérieure est essentielle, le fait de relier avec intensité la pensée au souffle et au mouvement...

 

N. C. : Tout danseur désireux de bien exercer son métier parviendra donc nécessairement à un état de présence à lui-même ; et cependant, tous ne s'en trouvent pas transformés...

M. B. : Vous savez, cela se passe dans l'inconscient... Les danseurs sont différents des autres êtres. Voilà pourquoi je préfère vivre avec eux plutôt qu'avec des personnes étrangères à la danse. Même s'ils disent n'avoir aucune préoccupation spirituelle, ils ressemblent à des moines, davantage en tout cas que les membres d'autres professions artistiques...

 

N. C. : Il suffit de regarder la pièce où nous nous trouvons pour deviner à quel point le Japon vous a marqué...

M. B.Au Japon, j'ai d'emblée eu l'impression de me trouver chez moi. C'est l'un des rares endroits du monde où la manière d'être, de vivre, n'a pour moi rien d'exotique mais me paraît au contraire familière, parfaitement naturelle. Ici même, je dors par terre, mon matelas est dans l'armoire et je le sors la nuit venue. Lorsqu'à dix-neuf ans je suis arrivé à Paris pour y travailler la danse, j'avais un peu de temps libre et me suis mis en tête d'apprendre le japonais. Je me suis donc rendu à l'école Berlitz où l'on m'a dit d'un air effaré : "Nous n'avons pas de professeur de japonais, mais retéléphonez donc demain." Le lendemain ils avaient déniché un vieux maître, un monsieur japonais très âgé qui m'a proposé de venir prendre le cours chez lui puisque j'étais son unique élève. Il m'a alors expliqué les liens étroits unissant la langue et l'écriture et m'a dit: "Si vous voulez apprendre à parler, il faut apprendre à écrire." J'étais prêt à me lancer dans la calligrapbie. Il a sorti dix feuilles de papier, a fait un trait et m'a prié de faire de même. J'ai donc tracé un trait, qu'il m'a fait refaire, inlassablement. Un mois durant, mes leçons de japonais ont donc consisté à faire un trait sur une feuille de papier blanc. C'était un poète, il m'invitait à prendre le thé avec sa femme, une très vieille dame, et il me lisait des poèmes en japonais. Je me suis également rendu à une conférence, passionnante, qu'il donnait au Musée Guimet. Enfin, au bout de deux mois, j'ai dû partir en tournée. Je suis revenu six mois plus tard pour apprendre la mort du vieux monsieur. Voilà ma première expérience du Japon. Pourquoi avais-je ainsi l'idée, en arrivant à Paris, d'apprendre le japonais ? Ensuite, l'arrivée des premiers films japonais a constitué pour moi une révélation. Regardant ces images, je me retrouvais chez moi. Je me suis empressé de dévorer la littérature japonaise disponible en traduction, des ouvrages d'histoire, de philosophie... Par conséquent, je n'ai guère été surpris lorsque je me suis pour la première fois rendu au Japon. Disons que les buildings de Tokyo m'ont davantage étonné que les cérémonies shinto !

 

N. C. : Vous avez, je crois, fréquenté d'assez près le maître zen Taïsen Deshimaru...

M. B.Oui, et il fut pour moi un extraordinaire ami. Nous communiquions de manière très spéciale. Lorsque j'ai donné à Paris la Messe pour le temps présent après l'avoir créée à Avignon, j'ai dit à Deshimaru combien je serais heureux de l'avoir pour spectateur de ce ballet. Il m'a répondu: "D'accord, mais je veux venir sur scène." Or, durant toute la représentation, je me tenais à genoux dans un coin de la scène et rythmais l'action avec des percussions. Deshimaru s'est installé à côté de moi et est demeuré assis en méditation pendant les deux heures du ballet. Je l'aimais profondément. Il m'a certainement beaucoup influencé du point de vue spirituel, mais sans jamais peser... Nous suivions des voies parallèles, et tant de choses se transmettaient entre nous par le rire, le regard, l'amitié. J'allais le voir à chacun de mes passages à Paris. Je me revois encore arrivant au dojo à n'importe quelle heure... Il me voyait et s'écriait: "Béjart est là! Du champagne !" Je ne sais pourquoi il m'avait associé au champagne, moi qui ne bois jamais... Il me fallait donc me plier à ce rite. Oui, mon amour pour lui était réel, immense... J'étais malade, et il m'a soigné par d'extraordinaires massages. Puis il m'a initié au zazen, nous avons comparé certains mouvements de danse à la pratique zen de la marche rituelle... Mais ce qui dominait avant tout, c'était ce sentiment de profonde amitié.

 

N. C. : Vous avez écrit que le zazen vous donnait tout ce que vous cherchiez dans la danse...

M. B. : Ce qui pourrait paraître absurde, puisque le zazen se pratique immobile... Mais cette immobilité du zazen est on ne peut plus dynamique, elle repose sur une tension de haut en bas qui paradoxalement, débouche sur le vrai relàchement. En fait, il y aurait beaucoup à dire, mais je répugne à parler de ces choses, je ne trouve pas les mots. Finalement, sans doute serait-il plus intéressant de parler de cette pièce que de s'entretenir de moi puisque ce moi précisément, je n'y crois pas !

Voyez-vous, la vie publique me paraît souvent insupportable, bien que je la sâche à certains égards indispensable. Pour subsister, je me sers du mythe hébraïque du golem. Je construis un golem nommé Maurice Béjart et l'envoie faire son boulot, mais ça ne me concerne pas. Ce golem donne des interviews, minaude à la télévision, sans que je m'identifie à lui.

 

N. C. : Alors, je vous prends au mot, parlons de cette chambre qui doit effectivement avoir beaucoup à dire.

M. B. Volontiers. Vous voyez ce chapelet ? Jamais je n'en avais vu de pareil. Je me trouvais dans le hall d'un hôtel de Tokyo où un moine était assis avec ce chapelet dans les mains. J'attendais quelqu'un, faisais les cent pas, et mes yeux ne cessaient de revenir à ce chapelet pour moi tout à fait fascinant. Le moine s'est levé, mon ami est arrivé, nous avons parlé, et lorsque je me suis retourné, le chapelet était toujours là, sur le siège, mais son propriétaire avait disparu. J'ai pris l'objet, ai dit au portier de l'hôtel que je le gardais dans ma chambre à la disposition du moine. Comme ce dernier n'est jamais venu le réclamer, je l'ai gardé...

 

N. C. : Je vois des sabres dans un coin.

M. B. : Oui, il y a même là un petit sabre de harakiri. Et voici un hôtel shinto. Vous savez que le miroir en lequel le shinto voit une image de la divinité, est un symbole essentiel dans toutes les religions. Pour les soufis, par exemple, le miroir comme la divinité, est complètement vide et, en même temps, contient tout. De plus, le miroir demeure intact. En dépit de tout ce qui s'est reflété en lui il reste toujours vierge. Peut-être le shinto est-il le fondement de la religion universelle...

 

N. C. : On vous dit converti à l'Islam... mais je devine que vous ne tenez guère à en parler...

M. B. : En effet, dans la mesure où l'Islam prête actuellement à toutes les équivoques politiques ou religieuses. En tout cas assimiler l'Islam à Khomeyni revient à réduire le catholicisme à Philippe II, ce si sectaire roi d'Espagne.

C'est d'autant plus absurde que 'Islam est sans doute l'une des religions les plus tolérantes qui soient. Ibn' Arabi n'a-t-il pas dit : "Mon coeur est la Mecque, mon coeur est la Thora, mon coeur est la croix"... Il portait toutes les religions en son coeur sans pour autant faire figure de syncrétiste ! Mais à quoi bon parler de tout cela ? Il importe de le vivre.

 

N. C. : Vous suivez l'enseignement d'un maître particulier ?

M. B. : J'ai été le disciple d'un maître, mais il n'est plus de ce monde. J'ai ensuite continué avec son fils. Mais à l'heure actuelle, je ne sais où il se trouve. Il a disparu... Je n'en dirai pas davantage.

 

N. C. : Croyez-vous, comme les hindous, à la possibilité d'une "délivrance" d'une libération intérieure définitive ?

M. B. : A certains moments, très fugitifs, nous parvenons tous à cette libération. Il m'arrive, dans le travail, de me sentir totalement libéré de mon corps, du temps, des êtres... de tout.

(A cet instant, Béjart pose son regard sur un kyosaku, un baton utilisé par le maître zen pour stimuler les énergies des méditants. Sans doute a-t-il surpris mon propre regard attiré par cet objet posé dans un coin. Il saisit donc cette occasion pour reparler des chose qui nous entourent.) Vous voyez ce kyosaku contre le mur ? C'est un cadeau de Deshimaru.

 

N. C. : Vous a-t-il tapé dessus avec ?

M. B. : Oh oui! (rires). La première fois que j'ai fait zazen, il avait un kyosaku à la main. Nous étions cinq ou six élèves dans un tout petit dojo. Il est venu à moi, m'a tâté les épaules, est reparti. Puis je l'ai vu, non sans effroi, revenir avec un kyosaku deux fois plus gros! Et pan ! (rires) Ah, le kyosaku... C'est fantastique. Ceux qui le considèrent comme une punition n'ont rien compris. Un bon coup de kyosaku procure tellement de bien-être... Savez-vous que je ne voyage jamais sans mon Kesa (l'habit du Bouddha, l'habit du moine, symbole de la transmission de maître à disciple), ce kesa donné par Deshimaru et sur lequel il a lui-même écrit au pinceau des fragments de textes bouddhistes.

 

N. C. : Vous conservez beaucoup de souvenirs de lui : ces calligraphies au mur, par exemple...

M. B. : Oui, je possède aussi quelques éventails... Il est tellement présent...

 

N. C. : Arrivant dans cet appartement avec l'idée de rendre visite à un musulman, on ne laisse pas d'être surpris : tout ici renvoie au Japon...

M. B. : Il est exact que je vis à la japonaise, avec un mélange de shinto et de bouddhisme, tout en faisant mes prières islamiques... Vous disant cela, je mesure à quel point ces propos peuvent paraître folkloriques, dénués de sérieux, alors qu'en fait... Voilà pourquoi il ne faut guère en parler. Tout cela est indicible.

Le goût du thé et de la danse

 

A ces mots ; je comprends que l'entretien est terminé.

Béjart, d'ailleurs, se lève et me propose du thé. Avant d'emprunter l'escalier pour gagner la cuisine, il prend le temps de me montrer divers objets auxquels il tient et qui tous ont pour lui une valeur spirituelle. Je prends en main le kyosaku et les éventails offerts par Deshimaru regarde attentivement le kesa dont mon hôte me commente les inscriptions. Nous passons ensuite dans la bibliothèque où abondent les ouvrages de spiritualité, puis descendons nous installer à une table disposée devant une baie vitrée. Béjart prépare lui-même le thé qu'il me sert dans des bols japonais. Nous parlons de Baudelaire, des chats qui accourent nous rejoindre et pour lesquels Béjart éprouve un amour non dissimulé. Il me dit sa timidité, l'angoisse qui l'étreint parfois lorsqu'il ne travaille pas, et m'invite à assister à la répétition de cet après-midi.

La matinée s'achève, je le sens déjà tendu vers la création. Sitôt le thé fini, je m'éclipse afin de le laisser se préparer.

Palais de Beaulieu. Les accents d'une musique slave me guident jusqu'au studio où je retrouve Maurice Béjart, à son poste sur une chaise devant le miroir.

Si je connais l'ambiance des coulisses de théâtre, jamais je n'ai encore vu des danseurs répéter. Le néophyte que je suis se trouve propulsé en un univers magique, régi par des lois autres. De filiformes jeunes gens, en jeans et en survêtement, déambulent de-ci de-là, puis soudain s'élancent et paraissent se rire des pesanteurs du corps. Dans un coin, une femme repose sur une jambe et garde l'autre levée tout en grillant une cigarette avec un naturel des plus déconcertants. Maurice frappe dans ses mains, et la musique s'éteint, les uns et les autres cessent de virevolter et sont attentifs aux directives du maître. Puis la mélodie reprend, et avec elle le travail, inlassablement. Non loin de moi est assis un homme dont la mise et le beau visage fatigué, non rasé, lui donnent l'air de sortir du lit. Drapé dans un peignoir, fume-cigarette à la main, Jorge Donn observe. Il restera ainsi tout l'après-midi, presque sans mot dire.
La sueur coule sur les bras et les fronts. Les pauses sont brèves, très brèves. Je suis arrivé vers quinze heures, soit deux heures après le début de la répétition. Celle-ci s'achèvera aux alentours de huit heures.

20h30. Maurice Béjart me dépose en ville dans son taxi. La journée est terminée, il est à présent seul avec sa fatigue et la plénitude de l'effort mené à sa limite.

 

 

 

 

 

 

   

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Commentaires
G
Monsieur, <br /> <br /> Certaines photos que vous publiez sur votre blog ont été travaillées très soigneusement et mises sur le net. Vous devez changer le nom de la photo ou mettre un lien avec le site d'où vous les avez copié.
L'après, l'ici et maintenant
  • Ce blog s'adresse à ceux qui s'interrogent sur l'après, la mort, le grand départ. Je fais partie de ceux qui sont morts et sont revenus. Depuis cette expérience, mon appréhension du monde, de l'univers de la réalité est bouleversé.
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