Où meurt-on en France ?

             

   Photo art Ashraf Moulfarha 

 Où meurt-on en France ? À l'hôpital, hélas...

Une étude montre la forte médicalisation de la fin de vie dans l'Hexagone, surtout en cas de cancer et de maladie vasculaire cérébrale.

  Photo art Angel Roy

En 2008, 57 % des décès survenus dans notre pays ont eu lieu à l'hôpital, contre 27 % à domicile, 11 % en maison de retraite et 5 % dans d'autres lieux. La proportion de décès en établissement de santé est restée globalement stable au cours des 15 dernières années, alors que le désir de finir ses jours chez soi est très fort. C'est ce que montre une analyse des certificats de décès entre 1993 et 2008, réalisée par des chercheurs de l'Observatoire national de la fin de vie (Paris) et du Centre d'épidémiologie sur les causes médicales de décès de l'Inserm (Kremlin-Bicêtre). Leurs travaux sont publiés dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire de ce mardi 11 décembre.

"Déshospitalisation" de la mort

"La plupart des patients et de leurs proches expriment le souhait de mourir à domicile, même si cela peut être générateur de stress ou d'inquiétude", rappellent les auteurs. La "déshospitalisation" de la mort est, selon eux, un enjeu important, tant pour répondre aux souhaits de la population qu'en raison du coût financier lié à une hospitalisation. D'où le développement de moyens favorisant le maintien à domicile des patients en fin de vie - hospitalisation à domicile, services de soins infirmiers à domicile, réseaux de santé en soins palliatifs...

Pour aider les politiques à bien cibler leurs actions, les chercheurs ont identifié les facteurs intervenant dans le lieu de fin de vie. Pour cela, ils ont analysé les certificats de décès - même si les lieux indiqués ne renseignent que sur la localisation des derniers instants et pas forcément sur les lieux où la fin de vie s'est déroulée. Cependant, cet indicateur permet de mettre en évidence les grandes tendances et facteurs de variations de la fréquence des décès à l'hôpital.

Caractéristiques démographiques

Premier enseignement : le cancer, la pneumonie, la grippe et les maladies cérébrovasculaires (type accident vasculaire cérébral) sont les principales causes de mort à l'hôpital. À domicile, ce sont le diabète et les maladies cardiovasculaires. Et, assez logiquement, dans les maisons de retraite, la plus forte part revient aux maladies du système nerveux, en particulier à celles d'Alzheimer et de Parkinson. Mais les auteurs soulignent qu'il est parfois difficile de déterminer (et donc de coder) la cause du décès, en particulier pour les personnes âgées atteintes de plusieurs pathologies.

Deuxième point : la proportion de décès survenant à l'hôpital varie également selon les caractéristiques démographiques. Elle est plus élevée pour les hommes et en diminution chez les femmes. Elle est plus faible pour les moins de 40 ans puis augmente progressivement jusqu'à 70-79 ans pour diminuer ensuite. La proportion va aussi en diminution chez les célibataires, les veufs et les divorcés, alors qu'elle augmente pour les mariés. Mais attention, les catégories utilisées pour qualifier le statut matrimonial (marié, veuf, célibataire, divorcé) ne prennent pas en compte le concubinage.

Nord/Sud

Troisième point : les décès se produisent plus souvent à l'hôpital dans le nord de la France que dans le sud, même après ajustement sur les variables individuelles (sexe, âge, état matrimonial, causes du décès) et environnementales (densité médicale et maisons de retraite). Et la fréquence des décès par tumeur à l'hôpital est plus importante en France que dans certains autres pays européens : 71 % contre moins de 60 % en Belgique, Pays-Bas, Écosse, Angleterre, Pays de Galles, pour l'année 2003. Cela pourrait s'expliquer par une différence dans l'organisation des soins et la possibilité d'une prise en charge alternative (prise en charge palliative hors hôpital notamment).

(Cliquer sur le titre pour lire l'article sur Le Point.fr)

A propos de l'auteur

 

Anne Jeanblanc suit la santé pour Le Point depuis plus de 25 ans. En parallèle, elle a notamment travaillé, toujours dans le domaine médical, pour France 2, France 5, Canal +, France Info, RTL et elle a écrit deux livres.